Zone à faibles émissions mobilité à Perpignan : Impact de son application

Interdire les voitures dans les centres des grandes agglomérations, tel est l’objectif des Zones à faibles émissions mobilité, dites ZFE ou ZFE-m. Si c’est déjà le cas dans 11 agglomérations françaises, la loi Climat et Résilience (2021) impose la création d’une ZFE-m au 1er janvier 2025 dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants, dont Perpignan Méditerranée Métropole fait partie.

Si cela s’entend du point de vue de de la lutte contre la pollution, c’est au niveau des modalités d’application que cela pose problème, en particulier dans de plus petites agglomérations comme la nôtre.

Comment la loi peut-elle s’appliquer de la même manière sur la métropole lyonnaise qui compte 1 400 000 habitants, et sur l’agglomération de Perpignan qui en compte 280 000, soit 5 fois moins ?

L’impact de la ZFE à Perpignan
A l’origine, le dispositif ZFE avait vocation à s’appliquer dans les zones où se mesurait un taux de pollution supérieur à 0,40 microgrammes de NO2/m3 d’air prélevé. L’OMS recommande désormais une application du dispositif à partir de 0,10 microgrammes de NO2/m3 d’air prélevé. Cette abaissement fait entrer PMM dans le champ d’application du dispositif ZFE.

Les véhicules seront catégorisés selon leur année de mise en circulation, grâce à une vignette « Crit’air ». Seuls les véhicules classés Crit’air 1 et 2 sont autorisés à circuler sans restriction dans les ZFE. Les véhicules classés en Crit’air 3, 4 et 5 subissent des restrictions.
Dans le parc de PMM, appliquer des restrictions aux véhicules Crit’air 3, 4 et 5 revient à interdire 41 % des véhicules particuliers et 51 % des véhicules utilitaires.

Le dispositif appliqué, tel qu’il est présenté aujourd’hui, affecterait quasiment :
1 véhicule sur 2, soit 40% du parc automobile !
Perpignan sera alors fortement impactée.

Cela est d’autant plus dommageable que l’offre de transports en commun ne permet pas d’offrir une vraie alternative quotidienne aux usagers de la route dont les véhicules seront interdits de circulation, en outre le parc de stations de recharge pour véhicules électriques n’est, de son côté, pas suffisamment développé.
Ce sont les relevés d’exposition aux microparticules qui permettent d’établir la définition du périmètre de la ZFE.
En l’état actuel des mesures réalisées par le prestataire de PMM, le projet de ZFE est le suivant (cf. carte).
La réduction de ce périmètre s’avèrerait inefficace à partir du moment où Perpignan, ville centre du département, resterait inaccessible. Il est donc important d’obtenir un aménagement pour assouplir le régime de sanctions liées au Crit’air 3.

Création d’une fracture territoriale et sociale
En fait de ZFE, il s’agit d’une « Zone à Forte Exclusion » que le gouvernement est en train de créer.
L’une des singularités de notre département est d’être un territoire peu urbain, dans la mesure où il existe une seule commune de plus de 15 000 habitants.

Perpignan bénéficie d’une forme de « centralité exclusive ». L’agglomération perpignanaise représente près de la moitié de la population des Pyrénées-Orientales.

Les habitants des Pyrénées-Orientales seront donc tous impactés.
Perpignan centralise plusieurs infrastructures et services à la population essentiels : aéroport, gare routière, hôpital, université… Même réduite à la surface de Perpignan, la ZFE sera donc excluante. Dans ces conditions, la création d’une ZFE créera de l’inégalité générée par l’interdiction de se rendre dans la principale zone d’attractivité du département, et conduira à une rupture du principe d’égalité devant la loi.
Par ailleurs, les aides financières décidées par le Gouvernement pour soutenir l’acquisition de véhicules « propres » s’avèrent insuffisantes, l’Etat doit faire un effort financier pour les habitants des métropoles et du périurbain sinon certains vont se retrouver exclus. On ne peut pas brutalement basculer tout le monde vers l’électrique.

Interpeller les pouvoirs publics
La municipalité de Perpignan ne peut laisser appliquer un tel dispositif en l’état sans mettre en garde sur ses conséquences, non seulement pour les Perpignanais, mais pour l’ensemble des habitants de notre territoire.

C’est pourquoi, un courrier a été adressé à la Première Ministre Elisabeth Borne, afin de l’alerter sur la situation et lui signifier que « cette indifférenciation entre les grandes métropoles et les villes moyennes risque de créer un sentiment de rejet réciproque des populations rurales et urbaines et favoriser un phénomène de concentration qui ne favorisera ni l’écologie ni la justice sociale ».

La municipalité entend également faire des demandes au Président de PMM, Robert Vila, à qui un courrier a également été adressé, tout comme à l’ensemble des maires des Pyrénées-Orientales, spécifiant qu’« il est impératif d’obtenir un maximum de dérogations aux restrictions de circulation » : transport en commun, véhicules de secours, de chantier, de livraison, « petits rouleurs », personnes se rendant dans la ZFE pour un motif d’urgence ou pour répondre à une convocation, véhicules des touristes en séjour dans l’agglomération, etc.

L’impact le plus significatif serait une dérogation pour la catégorie Crit’air 3 que seul le président de PMM est en mesure de demander à l’Etat.

En obtenant cette dérogation, on autoriserait la circulation de 85 % des véhicules particuliers et de 61 % des véhicules utilitaires répertoriés sur le territoire de PMM.

L’obtention de cette dérogation apparaît alors comme étant indispensable, pour ne pas exclure près de 40 % des usagers de la route résidant sur le territoire.

Par ailleurs, il apparaît impensable que le pouvoir de police du Maire soit transféré au président d’EPCI. En effet la Loi d’Orientation des Mobilités a créé un pouvoir de police de circulation liés spécifiquement à la ZFE. Les communes ne s’y étant pas opposées avant le 25 février 2022, c’est le président de l’EPCI qui détient cette compétence de façon définitive.

La Ville de Perpignan propose de redonner aux Maires la possibilité de s’opposer à ce transfert, au moins, là où les ZFE n’ont pas encore été créées, comme c’est le cas à Perpignan.

Un dispositif inadapté
Ce dispositif, qui prend un positionnement punitif avec bon nombre d’incohérences, impacte fortement les mobilités et l’accès aux activités quotidiennes et aux droits des individus, ce qui soulève des enjeux de justice sociale et pourrait, de ce fait, entraîner des mouvements de contestation à l’image des gilets jaunes.

Ce sont les habitants des communes rurales et périurbaines qui vont une fois de plus être exclus étant donné que ce sont eux qui possèdent le plus fréquemment des véhicules les plus polluants. Or, ces territoires sont aussi ceux où la dépendance automobile est la plus forte, en particulier dans un département comme le nôtre.

Le cadre législatif laisse aux métropoles une grande souplesse pour fixer le calendrier de mise en œuvre, les conditions d’accès aux ZFE (types de véhicules concernés par les restrictions, périmètre géographique, dérogations), ainsi que les mesures d’accompagnement éventuelles ; la municipalité de Perpignan attend donc de la part de PMM et de son président un positionnement et une véritable concertation.

En étant la seule zone urbaine du département, l’agglomération de Perpignan bénéficie d’un rayon d’attractivité qui dépasse les frontières de son territoire et à ce titre, la ville centre ne peut être exclue des débats.

la loi Climat et Résilience (2021) impose la création d’une ZFE-m au 1er janvier 2025 dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants, dont Perpignan Méditerranée Métropole fait partie.