Rejets polluants en Méditerranée : Surfrider Foundation Europe souligne une victoire en demi-teinte face à la réformation de l’arrêté Alteo

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Après avoir tenu une audience le 14 juin dernier, le tribunal administratif de Marseille a aujourd’hui annoncé son verdict quant à la légalité de l’arrêté préfectoral du 28 décembre 2015, permettant à l’industriel Alteo de maintenir un rejet polluant d’effluents liquides dans le milieu naturel. Face à l’annonce de la réformation de l’arrêté, et non l’annulation demandée par Surfrider Foundation Europe, l’ONG souligne aujourd’hui une victoire en demi-teinte sur cette affaire et reste attentive au suites concrètes qui lui seront données.

Le Tribunal a annoncé ce matin, du 20 juillet, la réforme de l’arrêté d’autorisation d’Alteo, ramenant le terme de la dérogation au 31 décembre 2019 au lieu du 31 décembre 2021. » Un terme anticipé, réaliste et raisonnable » se félicitent les experts de Surfrider Europe.

De plus, le Tribunal constate l’absence d’analyse des effets cumulés du projet et somme le Préfet et l’usine Alteo de compléter l’étude d’impact sur les effets cumulés des rejets en mer et du stockage des boues rouges sur le site de Mange-Garri. Une fois l’étude produite, une nouvelle consultation publique devra être réalisée, le tout dans un délai de 6 mois à compter de la notification du jugement, soit ce jour. Ce délai est « jugé irréaliste » par Surfrider Europe qui restera présent et alerte sur le dossier en cours notamment jusqu’à l’application effective de la régulation des rejets autorisées prévue pour 2019.

Retour sur l’affaire – l’usine alteo autorisé à déverser des substances chimiques en milieu naturel
Depuis 1967, l’usine d’alumine Alteo Gardanne déverse en mer Méditerranée, mer particulièrement vulnérable, des rejets qui remettent en question même le caractère durable de l’espace protégé du Parc National des Calanques.

Des mesures ont été prises au cours des dernières années, notamment avec l’arrêt de la partie solide des anciennes « boues rouges » (Une). Mais alors qu’Alteo avait jusqu’en décembre 2015 pour se mettre en conformité avec les textes en vigueur, l’arrêté préfectoral du 28 décembre 2015 a accordé à l’industriel une autorisation lui permettant de déroger aux normes limites de rejets (établies dans l’arrêté du 2 février 1998) pour 6 paramètres physico-chimiques et ce pour 6 ans.

Ce qui signifie que l’usine est autorisée à déverser des rejets sous forme liquide qui dépassent, et cela de très loin, les seuils imposés continuant de faire de la Mer Méditerranée une des mers les plus polluées d’Europe.

Une décision jugée inadmissible par Surfrider qui en décembre 2016 a déposé un recours en justice contre cet arrêté demandant son annulation afin que les rejets cessent ou, a minima, restent en dessous des seuils tolérés par la Convention de Barcelone visant à protéger la Méditerranée.

La mer méditerranée exposée à de nombreuses sources de pressions
La Méditerranée est une mer semi-fermée, aux côtes densément peuplées accueillant aujourd’hui 30% du transport maritime mondial et un tourisme de plus en plus important sur ses littoraux. De nombreux plans et documents ont été adoptés en vue de préserver cet espace naturel spécifique, avec, en tête de file, la Convention de Barcelone de 1976. Pourtant la Méditerranée, particulièrement vulnérable, reste à ce jour toujours exposée à de nombreuses sources de pressions et pollutions diverses.

L’urgence environnementale de l’affaire Alteo :
– Depuis plus de 50 ans de grandes quantités de déchets industriels sont déversées par l’usine Alteo dans une fosse sous-marine au large de Cassis
– Les effluents liquides ( anciennement boues rouges) sont acheminés sur 54,6 km par tuyau jusqu’à la mer
– Puis rejetés à 7,7 km des côtes
– Et déversés à 320 m de profondeur dans le canyon de Cassidaigne
– Plus de 20 M de tonnes de boues rouges ont déjà été rejetées sur plus de 2 000 km2 de fonds marins, soit 1 095 tonnes par jour en moyenne depuis 1967.

Un combat surfrider de longue date pour que toute pollution en mer stoppe
Au-delà du recours déposé par Surfrider Europe demandant l’annulation de l’arrêté préfectoral du 28 décembre 2015, l’ONG requiert que le principe de précaution soit respecté et appliqué avec fermeté par les représentants de l’État.

« Il est temps d’aller au-delà des discussions sur un nécessaire arrêt de pollution et d’agir en conséquence, via la prise de mesures concrètes au bénéfice de notre environnement littoral et marin. En 2020, l’Europe s’engage à un bon état écologique des eaux marines continuer de rejeter n’est pas cohérent avec cette ambition » indique Sarah Hatimi, Responsable du programme qualité de l’eau au bureau Surfrider Méditerranée.

Dans le cas précis du dossier Alteo, Surfrider exige que les réglementations nationales et européennes soient respectées sans dérogation. « L’exploitant aurait dû réfléchir aux solutions de mise en conformité de ses installations. Ce n’est pas à la mer méditerranée et à ses usagers directs d’en payer aujourd’hui le prix. » explique encore Sarah Hatimi.

Fort de la mobilisation des bénévoles et du suivi assidu depuis de nombreuses années de l’ONG, Surfrider Foundation Europe souhaite souligner une victoire en demi-teinte face à la réformation de l’arrêté du tribunal administratif de Marseille dans l’affaire Alteo.

Cette annonce, bien que représentant un pas en avant pour le combat et l’environnement, reste insuffisante et bien en deçà des attentes de l’ONG. Surfrider Foundation Europe réitère la nécessité d’une réelle prise de mesures face à l’urgence de la préservation de la mer Méditerranée et de l’océan.

Enfin, Surfrider Europe au travers de ce dossier souhaite alerter sur la problématique plus large, au niveau national et européen, quant au respect des législations en faveur de la préservation et protection de l’océan.