P-O : La Préfète veut imposer un autre tourisme

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p-o-la-prefete-veut-imposer-un-autre-tourismeElle l’a dit : « il faut sortir du trajet camping-plage ». Elle commet pourtant une grave erreur d’appréciation

C’était à la fin du mois d’avril, dans les salons de La Villa Duflot, à Perpignan. Professionnels du tourisme, élus politiques et consulaires, institutionnels, étaient invités par le journal L’Indépendant à débattre sur le thème du tourisme, « à la conquête du marché espagnol », dans la cadre des rencontres mensuelles du Club de l’Eco de L’Indépendant.

Naturellement, comme souvent dans ce genre de débats, localement en tout cas, on prend les mêmes et on recommence : on invite à prendre la parole celles et ceux qui ne voient que par le petit bout de la lorgnette et dont on sait, surtout, qu’ils ne feront pas de vagues, qui ne mettront pas de cailloux dans les chaussures en guise de talonnettes… et pour cause : ils sont eux-mêmes bien souvent à l’origine des situations actuelles, entre mer Méditerranée et montagne pyrénéenne, incapables de montrer du doigt, de dénoncer, les dysfonctionnements des administrations, mais aussi des représentations locales et territoriales. « Nous allons gaiement dans le mur ! » ; l’élue Arlette Franco, alors maire RPR de Canet-en-Roussillon, et le restaurateur Alain Bastus, alors bouillonnant président de l’Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière, entre autres « empêcheurs de tourner en rond » et de ronronner n’ont cessé de le dire, de le répéter et de le crier dans les années 90.
Aujourd’hui : silence ! Tous les pseudos-agitateurs sont rétribués, indirectement de par les fonctions qu’ils occupent, pour se taire. Ne surtout pas bouger, ne surtout pas remettre en cause « le » système qui nourrit les privilèges et érige certaines baronnies locales en « espèces » sonnantes et trébuchantes.
Et dans ce domaine, le Tourisme, désormais – Quoi qu’en dise et quoi qu’en pensent les lobbies agricoles – principale activité industrielle sur le sol roussillonnais, n’échappe pas à la règle, hélas.
Josiane Chevalier, préfète des Pyrénées-Orientales, en place à Perpignan depuis maintenant 8 mois, a cru certainement qu’elle créerait un électrochoc lorsque, parmi les notables réunis à ce Club de l’Eco de L’Indépendant, en s’exprimant ainsi, s’agissant plus particulièrement de l’hôtellerie de plein air : « Même si les professionnels du secteur me disent qu’ils y travaillent, j’observe cependant que les trajets et les consommations des touristes dans les campings sont limités. Il faut une meilleure promotion de la ville de Perpignan et également de tout l’arrière pays roussillonnais pour qu’ils sortent du trajet camping-plage (…) ».
Visiblement, ses conseillers ne l’ont pas briffer avant qu’elle s’installe devant les micros. Car s’il est, sur le littoral roussillonnais en tout cas, un secteur qui a bien réussi sa révolution, c’est bien celui de l’hôtellerie de plein air : depuis les criques de Collioure jusqu’aux plages de sable fin du Barcarès (pour rester dans les frontières départementales), en passant bien sûr Argelès, Saint-Cyprien, Canet et Torreilles, les campings ne sont plus uniquement les villages de toile qui fleurissaient au bon temps de la période des premiers congés payés.
Les campings du 66 ont suivi et subi une telle transformation pour séduire les tour-opérateurs européens, ils se sont tellement suréquipés que leur clientèle ne sort pratiquement plus lorsqu’elle débarque dans les sites où, autour des mobil-home, elle trouve tous les services, commerces, la sérénité… et les plus belles piscines plus bleues que la mer Egée et aux abords manucurés comme des lagons ! En 2015, les campings d’Argelès et de Canet proposent toutes les tentations estivales, du néo-écolo à l’ultra-luxe (spa…).
On comprend mieux, dès lors, pourquoi les touristes ne souhaitent pas forcément quitter les campings lors de leur séjour sur le littoral roussillonnais – puisqu’ils y trouvent (de) tout pour passer une saison radieuse – si ce n’est pour s’offrir un restaurant gastro ou effectuer une séquence-shopping.
Ensuite, oui Mme la Préfète les touristes qui viennent séjourner sous le soleil du Roussillon choisissent délibérément d’y venir car, et ils le confirment sur les livres d’or des Offices de tourisme dans les stations balnéaires, ils sont d’abord « attirés par les atouts naturels » de notre département : soleil, mer… et montagne.
La plage du Racou par exemple, située au sud du territoire d’Argelès-sur-Mer, ou la plage de Paulilles, entre Port-Vendres et Banyuls-sur-Mer, sont régulièrement plébiscitées dans les médias nationaux et européens comme « parmi les plus belles » plages de France.
Il en est de même pour la façade maritime de la Côte Vermeille, la plage de Torreilles et ses restaurants sur le sable, l’embouchure sauvage du bocal-du-Tech, la plage de Terrimbo à Cerbère, etc.-etc.
En ce sens, l’ancien président de la Région et sénateur des P-O, Christian Bourquin, avait été précurseur et visionnaire en créant le Parc marin naturel du Golfe du Lion, premier espace du genre en Méditerranée française. Il savait que la mer est notre avenir économique et donc touristique.
C’est bien Météo France qui, tous les soirs, ou presque, fait saliver devant les téléviseurs nombre de Français établis au nord de la Loire – et même plus bas à Toulouse, Albi, Rodez, Aurillac.. – en affichant des records de « chaleur » pour Perpignan et sa région.
Les 8 millions de visiteurs annuels qu’enregistre notre département ne se précipitent pas pour voir les Déferlantes d’Argelès, les Jeudis de Perpignan, le musée d’art contemporain de Céret ou encore pour se recueillir sur la sainte-tombe d’Arles-sur-Tech (pour tenter de résoudre le mystère de son sarcophage)… C’est bien pour les magnifiques plages des Pyrénées-Orientales et son climat, pour l’essentiel, qu’ils viennent y séjourner. Et lorsque le temps n’est pas de la partie, c’est une balade à Collioure ou un business-plan-transfrontalier qu’ils privilégient.
Alors c’est sûr, dans ces conditions, la clientèle espagnole de proximité (les Catalans du sud) n’a aucun intérêt à venir en Roussillon : nous avons Collioure, ils ont Cadaquès ; nous avons Argelès et Canet, ils ont Rosas et Lloret-de-Mar, nous avons Saint-Cyprien, ils ont Platja d’Aro… et le Palais des Rois de Majorque de Perpignan ne pourra jamais rivaliser avec la Cité de Carcassonne pour leur assurer un total dépaysement !
Le soleil, la mer et la montagne constituent nos richesses, ne commettons pas l’erreur de l’ignorer. Continuons en parallèle de développer la vigne et la gastronomie, qui constituent l’autre pan de cette offre touristique diversifiée et dont l’essor à l’international (côté image) ne cesse de grandir depuis une belle décennie. Nous l’avons vérifié tout récemment encore avec l’impact des vins roussillonnais sur le marché asiatique en général, chinois en particulier.
S’il est un créneau, dans le secteur du tourisme local, qu’il faudra revoir, c’est plutôt sur la sécurité et l’accueil des personnes qu’il faudra vite (ré)investir.