Le Barcarès : Franck Maurence, l’artiste qui redonne des couleurs à la ville

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Le maire lui a donné son feu-vert pour initier une importante et originale phase de restauration des façades. Un chantier spectaculaire pour vanter la commune et qui s’étire sur 40 ans d’histoires !

En janvier 2016, Alain Ferrand, maire du Barcarès, prend l’initiative inédite en France de confier à un artiste, Franck Maurence, la mission de relooker sa ville.

Assisté des services techniques municipaux et de ceux de l’Urbanisme, Franck Maurence se lance. Il a le feu-vert du 1er magistrat pour oser, créer, innover… Le projet, ambitieux, historique !, concerne aussi bien des résidences que certaines maisons de particuliers. Au bout de son pinceau et de son imagination : colorimétrie avec, parfois, l’insertion d’une peinture murale.

Le Programme d’Art Urbain (P-A-U) prend rapidement de l’ampleur et, malgré l’étendue de la station balnéaire, son impact visuel commence à se voir, à se lire dans le cadre environnemental… si bien que l’idée d’un Circuit de Peintures Monumentales se matérialise pour l’été prochain.

Conçue dans les années 1970, dans le cadre de la Mission Racine, Port-Barcarès est une commune qui, comme la plupart des stations balnéaires, voit sa population littéralement exploser en haute saison estivale, pour passer d’environ 5 000 habitants l’hiver à plus de 100 000 l’été.

L’idée générale de départ du P-A-U est de valoriser le patrimoine architectural de la ville.

Une collaboration unique en France
Franck Maurence se confie : « A vrai dire seuls les murs m’ont vraiment intéressé. C’est la méthode qui m’apporte chaque fois l’énergie nécessaire à la continuité de l’action. C’est cette méthode qui constitue un art. En cela on peut parler d’un travail artistique. Je l’ai acquise au travers de mes études aux Arts Décoratifs de Strasbourg et, surtout, au fil des années de travail sur des supports de plus en plus monumentaux, offerts au public, visibles de tous comme des façades d’immeubles, des châteaux d’eau ou des casots… L’essentiel étant de multiplier les actions picturales pour expérimenter des outils de traçage, les inventer parfois, tester les couleurs et leurs correspondances ».

En mars 2013, la municipalité du Barcarès lui demande d’intervenir sur une résidence, lors du ravalement de façades. Il s’agit de la Résidence du Port : « Cet exemple va me servir à expliquer ma méthode, ma démarche artistique ». Devant le succès de l’opération, le maire, Alain Ferrand, décide donc de lui confier, en novembre 2013, une mission pour la Ville du Barcarès ; celle-ci va lui permettre de positionner son travail dans un espace donné, pendant une durée définie, et ainsi lui offrir la possibilité d’expérimenter la totale expression de cette méthode. »

Aujourd’hui, presque quatre ans plus tard, le résultat commence à se voir, à se faire sentir : cette collaboration étroite entre un artiste et une ville, sur pareille dimension, est unique en France. Plus qu’un pari : c’est un défi. « La confiance et la liberté qui se sont installées entre nous, nous ont permis d’œuvrer tous les jours dans la continuité, de matérialiser un concept artistique unique en son genre qui pourra constituer à terme une réelle spécificité de la ville, pour devenir une référence, un outil de valorisation touristique et culturel pour la ville ».

A l’évidence, pour en arriver là, il a fallu démarrer la mission de valorisation du patrimoine architectural par un concept fort, indiscutable et fédérateur. Port Barcarès est la première porte maritime sur la Méditerranée Catalane, en arrivant d’Occitanie et de l’Europe du nord. Ce constat va ouvrir un champ de possibles, de couleurs et de sujets d’inspiration à l’artiste : Le Barcarès est une ville qui s’est construite durant les années 70, avec de grands noms de l’architecture, dans le cadre de la Mission Racine. Ils ont imaginé des résidences pour des budgets modestes, au plus proche de la nature. Ainsi des canaux reliant la mer à l’étang furent creusés pour accueillir de grands ensembles immobiliers, souvent des marinas. Mais l’Etat abandonna le projet avant son aboutissement et laissa à la commune le soin de finir le chantier immense.

Le blanc est une priorité
Ce relais, c’est Alain Ferrand et son épouse Joëlle Iglésias, aux commandes de la municipalité, qui a tour de rôles vont le prendre et l’assumer pour réanimer la station balnéaire populaire sous toutes les cultures : le festival des musiques électroniques, Electrobeach, sera l’un des électrochocs pour repartir de l’avant et donner au Barcarès une âme, une identité, une jeunesse, une autre dimension.

La mission de Franck Maurence s’inscrit justement dans cette « ouverture au monde », laquelle, le concernant, consiste à mener une action plastique globale sur l’ensemble des bâtiments de la ville : « J’interviens sur les bâtiments communaux comme le stade, le groupe scolaire, le château d’eau ou encore la centralisatrice et les postes de secours. Une grande partie de mon temps est consacrée à l’étude des projets de ravalement des résidences en collaboration avec les copropriétaires et les syndics d’immeubles. Nous avons défini un nuancier communal qui sert de base de réflexion et imprime une cohérence dans le choix des couleurs utilisées lors des ravalements. Le blanc est une priorité. Les autres teintes s’inspirent directement des couleurs environnantes, celles qu’on retrouve dans la nature mais aussi les couleurs vives des barques catalanes qui ont donné le nom de Barcarès. Je m’intéresse plus particulièrement aux architectures visibles depuis les axes principaux qui traversent la ville. Elles sont les vitrines de notre action. Ma priorité était de marquer, par des interventions artistiques et fortes, la RD 83, une quatre voies par laquelle les automobilistes traversent le Barcarès à 110 km/h sans savoir qu’ils sont dans une urbanisation et l’avenue du 14 juillet qui constitue l’axe de vie de la commune avec un centre commercial, la mairie, les HLM La Pinède et le groupe scolaire qui s’étend sur plus de 300 mètres… Nous commençons à matérialiser un cheminement qui proposera aux visiteurs une visite expliquée et illustrée de toutes ces réalisations sous la forme d’un circuit ponctué d’arrêt s sur des points de vue à partir desquels ils pourront découvrir les esquisses, les outils de travail, la vision de l’artiste et comment chaque réalisation est étroitement reliée à son environnement. Le sujet me permet de mettre en application, comme dans un cas d’école, toutes les théories que j’avais expérimentées au cours de mes travaux antérieurs sur des bâtiments du grand paysage tels que les châteaux d’eau. Mais là, la difficulté supplémentaire était de devoir travailler en collaboration étroite avec une entreprise de peinture, de devoir tout concevoir dès le départ pour que le design soit rempli au rouleau par les équipes de peintres en bâtiment ».

Le résultat de cette collaboration a fait apparaître qu’il était possible de réduire considérablement le coût d’une immense peinture murale, d’un design sur supports monumentaux et travaillant en collaboration étroite avec des entreprises de peinture, en préparant les projets dans ce sens.

Une nouvelle activité venait de se préciser : l’artiste proposa au maire de travailler dans ce sens… et l’élu accepta l’idée en lui confiant la mission de repeindre une ville.

La méthode retenue par Franck Maurence :
1. Regarder l’architecture, le sujet en utilisant le cheminement du public, le plus souvent des automobilistes. Ce seront les spectateurs de la réalisation. Choisir un point de vue collectif, qui fait consensus. C’est celui où passent le plus de personnes ou l’angle de vue dans lequel le bâtiment reste le plus dans le champ de vision (le plus souvent un rond-point, une ligne droit…) Puis prendre plusieurs photos à la hauteur des yeux depuis ce point de vue. C’est à partir de là que le traçage se fera. Il doit être matérialisé au sol par un repère de couleur… Ce sera le point de rendez vous entre la vision de l’artiste et le public.
2. Analyser le support afin de savoir s’il est lisse ou crépis, exposé au nord, aux vents ou au soleil…Plus le mur est crépi, plus le dessin sera simple. Ce qui ne veut pas dire facile à concevoir et surtout à tracer. Connaître l’entreprise de peinture pour savoir jusqu’où les équipes sont capables d’aller dans les détails.
3. Concevoir un motif composé d’aplats de couleurs référencées à partir de la palette chromatique sélectionnée pour la résidence. Le dessin est fait à la ligne claire pour délimiter des zones nettes de couleurs. Penser à la qualité du support sur lequel il va falloir tracer puis peindre. Prévoir le système de levage le moins encombrant pendant le traçage pour éviter au maximum la pollution visuelle de l’échafaudage. 4. Utiliser la méthode de traçage la plus appropriée en fonction de la distance entre le point de vue et la partie du support la plus éloignée, du motif à dessiner et de la volumétrie du support. Laisser une marque claire et précise qui servira de guide
5. Peindre les réchampis suffisamment larges pour que les équipes de peintres puissent confortablement passer leurs rouleaux.

Bio Express
Natif de Bastia (Corse), Franck Maurence, 56 ans, est d’origine catalane, de Olot plus précisément. Son deuxième nom est Barthuem Llanas. Il est incontestablement l’un de nos artistes comptant parmi les plus prolixes et jouissant d’une notoriété européenne. Sous le soleil du Roussillon, on lui doit notamment parmi ses réalisations antérieures : les châteaux d’eau de Sainte-Marie-la-Mer, Pollestres, Céret, Saleilles et Bages. Il est également interven le fron-de-mer de Canet-plage, pour le Département (alors Conseil Général), le logo de l’Hôpital de Perpignan… et des dizaines de peintures murales de Barcelone à Miami, en passant par Toulouse et Paris.

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L’artiste Franck Maurence avec Jöelle Ferrand-Iglesias.

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