Estagel/ Roger Payrot est parti : l’homme de théâtre, de culture, le poète, n’est plus.

Pendant la répétition de "Thèbes" en 2014.

Roger, c’était celui que nous avions toujours plaisir à simplement croiser dans la rue, au marché à la promenade des platanes ou au kiosque pour acheter le journal et son indétrônable cigarette. De sa voix timide, le bonjour était toujours au bout de ses lèvres. L’éclat de ses yeux disait s’il était là où ailleurs.

Ceux qui le connaissaient, savaient à son regard, si une conversation pouvait être commencée ou s’il était plus simple de laisser Roger dans ses rêveries, dans son monde, construire sa pièce de théâtre, rédiger un poème ou quelques belles phrases.

Roger un homme à la culture infinie.

Le mot immense est réducteur lorsque nous parlons de la culture de Roger. Son savoir dans tous les domaines, dépassait parfois l’entendement pour le commun des mortels. Où prenait-il le temps pour apprendre et accumuler tout ce savoir ? Mystère !
Depuis l’Ecole Normale et ton poste d’enseignant d’Anglais à Estagel, avec tes complices de toujours, Antoine, et André pour ne pas les nommer, avec Danielle, Josée, tu as pu t’engager, dégagé des tâches matérielles, dans la voie théâtrale.

Le metteur en scène en pleine réflexion.

C’était le début de l’aventure, de ton aventure. Elle devait mener toute ton existence jusqu’aux dernières heures de ta vie. Pendant tout ce temps, tu tenais en haleine tous tes proches, et bien au-delà, lorsque tu avais décidé une création. Tu as excellé dans cet art, entraînant avec toi des générations de jeunes collégiens devenus assoiffés de culture, grâce à ton engagement sans borne au service du théâtre. Mais d’autres aussi, ayant des engagements ailleurs, et ne pouvant pas matériellement, être dans ce cercle, n’en combattaient pas moins d’une façon complémentaire. Ils étaient finalement à tes côtés, pour faire avancer cette nécessité de mettre la culture à la disposition du plus grand nombre. Cela pour dire, que ton cercle d’amis, était large, très large.

Avec François Noell, un fidèle parmi les fidèles aux éclairages.

Ce que tu as construit pendant tout ce temps, c’est la pensée d’hommes et de femmes tournés irrémédiablement vers la culture garante de paix, de tolérance, d’amitié, de liberté de penser.
Bien au-delà des frontières d’Estagel, tu as rayonné comme un homme discret et plein de bienveillance pour les autres. C’est très certainement l’image toute simple, mais combien suprême, que tu laisseras en héritage.

Lors d’une conférence de presse présentant le festival d’Estagel, à l’ombre de François Arago.



Roger un débatteur à la fine plume.

Roger à une soirée de « Cie Marie est de la Nuit »

Grand débatteur à l’écriture fine, tu savais avec les mots, susciter la réflexion de chacun. À l’occasion, pour tel ou tel événement, tes écrits ne manquaient jamais de susciter des commentaires, y compris des débats. C’était ta force, ton savoir-faire, tout en te mettant à la portée de la compréhension de tous, car une de tes préoccupations était d’être compris !

Roger, auteur et metteur en scène de « Casser la voix » en 2016.


Tu n’aimais pas pour autant les hommages. L’humilité était ta vie, ta façon d’être, ta source d’inspiration. Homme discret s’il en était, tu n’aimais pas briller sous les feux de la rampe, même si, par taquinerie, tu a été contraint à cet exercice de style qui n’était pas le tien.

Roger en régie !



Roger l’homme engagé

Ta soif, d’apporter le savoir aux autres, t’a conduit inexorablement, comme l’a fait Aragon, dont le 40e anniversaire de sa disparition vient d’être honoré, à être un compagnon de route des communistes. Mais avoir la carte d’un parti, n’était pas l’essentiel dans ta pensée pour regarder l’avenir, pour le construire dans l’intérêt du plus grand nombre. Et tu as fait bien plus que d’apporter ta pierre à l’édifice.
Comme disait Brel, « le talent, ça n’existe pas. Le talent, c’est d’avoir envie de faire quelque chose ».

Avec Sol Zarka de la « Cie Marie est de la Nuit » et le « Théâtre de la Remise » en 2018.

Et tu l’as fait.
Allez l’ami ! Adieu !

Joseph Jourda