Estagel : L’homme est un loup pour l’homme

Le camps de Rivesaltes



« L’homme est un loup pour l’homme ». Autrement dit, l’homme est le pire ennemi de son semblable ou de sa propre espèce. Thomas Hobbes (1588-1679 ) inventeur avec Machiavel (1492-1527) de la politique moderne, ne disaient pas le contraire dans leur recherche des fondements d’une autorité légitime et les causes de la vie en société.

Cette phrase nous rapproche inexorablement des événements que nous avons vécus ces derniers jours dans notre département, dans notre pays.

Dans notre département, c’est l’inauguration du mémorial de Rivesaltes. Il servira à ne pas oublier la misère des peuples, ses souffrances, ses traumatismes imposés par des hommes à leur semblable. Il servira, c’est notre vœu le plus cher, à ne plus revoir cela, à ne plus devoir subir les résurgences de la barbarie. Il servira, nous en sommes persuadés, à faire en sorte que des femmes, des hommes courageux se dresseront encore et toujours contre le morbide, les pensées les plus funestes, la mort.
Ce mémorial a été inauguré par monsieur Valls, Premier ministre du gouvernement Hollande. Très bien. Il a rappelé et mis en exergue tous les malheurs de tant de personnes. Encore très bien.
Quasiment dans le même temps, des gens du voyage créaient des problèmes pour le moins violents et surtout médiatisés, de telle manière que nous aurions pu réellement croire à un épisode dramatique de guerre civile.

Il n’en faut pas moins pour enflammer les passions, les discussions. Et ce, dés le petit matin dans les groupes qui immanquablement se forment avant l’heure de reprendre le travail. Sur la place du village ou encore devant le « petit noir » consommé au saut du lit sur le coin d’un bar.
Oublié, le mémorial. Oublié le « ne plus revoir cela ».
Voilà que les camps des gens du voyage sont détruits, broyés, brûlés, cassés, éradiqués de notre civilisation. Plus jamais, en suivant ces raisonnements, nous ne devrions voir des terrains de sports utilisés pour campement.
Vous avez dit atroce ? Et bien ces raisonnements le sont. La peur de l’autre, de l’inconnu, la peur des différences ont mis sur la portée musicale l’horreur des mots, des phrases qui distillent la haine, qui distillent la violence. Inadmissible pour les personnes qui ont du cœur, qui savent ce que veut dire souffrir dans son âme. Peu importe la religion, la croyance, l’engagement politique. Lorsque des gens expriment une souffrance, nous nous devons d’être présents, d’assumer notre appartenance à un monde (pas toujours) civilisé, de faire preuve de tolérance, de compréhension, d’humanisme. Si réellement, nous ne voulons pas revoir des résurgences d’un passé pas si lointain, c’est le prix à payer. Le prix pour vivre dans un monde de paix, de bonheur partagé ou tout serait réfléchi, mis en œuvre pour que l’homme ne soit plus un loup pour l’homme.

Donc, d’un côté, nous avons le discours qui tend à vouloir mettre tout en œuvre pour ne pas oublier. De l’autre, son extrême qui s’exprime, qui coupe, qui brise qui détruit, qui nous ramène dans un passé morbide dont la puanteur nous renverse encore.
Espérons que nous ne sommes pas en train de vivre un mauvais jeu de rôle. En train de vivre un jeu politicien funeste, qui consisterait à mettre en évidence l’horreur pour que d’autres puissent s’ériger en rempart contre cette même horreur.
S’il en est ainsi, honte aux auteurs de ces manigances. Ils ne méritent que le mépris le plus absolu, le plus vrai, le plus humain.