Estagel : les artistes anonymes


L'art d'Henri et les "Dragons catalans"
L’art d’Henri et les « Dragons catalans »


Les artistes anonymes sont plus nombreux que nous pouvons croire. Il est nécessaire de regarder, d’écouter, d’entendre, pour les découvrir. Ils se situent dans tous les domaines. De la simple expression orale que sont les conteurs, à l’artiste-peintre. Au poète écrivant des vers ou se retrouvent mêles la simple nature et l’engagement de la femme, de l’homme, en passant par le cuisinier de talent pour qui la cuisine est un art.Si les moyens étaient mis en œuvre pour permettre à toute cette richesse d’émerger, de vivre, de s’exprimer, combien la vie serait plus harmonieuse, agréable, plus encore digne d’intérêt. Combien la culture mise à la disposition de toutes et tous deviendrait une réalité pour aller dans le sens de l’émancipation humaine.

C’est ainsi que nous sommes partis à la découverte d’Henri. Il habille de simples bouteilles en verre de décorations à son goût, à son humeur parfois vagabonde et taquine. Il fait cela pour son plaisir, ses amis, émerveillés par son humble talant. Aucun ne pouvait l’imaginer dans ce rôle d’artiste. Ne vous risquez pas à le convaincre de vendre. Il pourrait vous claquer la porte au nez si fort, que les murs en trembleraient. Le bruit retentirait avec violence dans votre tête, sonnant ainsi la fin d’une amitié. Henri est le fils d’une famille nombreuse de notre village.

La famille Destrade.

Tout d’abord, Juju et Momo aujourd’hui disparus. L’un était le contraire de l’autre. Juju l’exubérante, la passionnée, l’intransigeante, amoureuse de la justice. Elle n’avait jamais peur des mots, disant ce qu’elle pensait, que cela plaise ou pas. Momo, la placidité faite homme, mais capable de colères mémorables pour montrer le chemin de l’honneur, de l’honnêteté à sa progéniture. Ils se sont rencontrés dans les durs moments de la Résistance et ont vécu une vie de labeur intense pour élever une grande famille. Il en faut du courage pour faire grandir six filles et sept garçons aussi diablotins les uns que les autres. Ils ont tout fait pour donner une éducation honorable à toutes et tous. Ils ont réussi. Lorsque vous dialoguez avec eux du temps qui passe, aucun n’oublie de parler de la sœur aînée. Dédé, trop tôt disparue. Elle été la grande sœur qui grondait gentiment. Les pouvoirs publics ont honoré Juju en lui remettant la médaille d’or des familles nombreuses. Juste récompense.

Henri le quatrième

Il en fallait un. C’est Henri le bien nommé. C’est lui l’artiste. Quatrième des garçons, après une vie de travail bien remplie, toute simple, le voilà à la retraite dans le village qui l’a vu naître. Son village : Estagel. Aujourd’hui, il partage son temps entre la compagne de toute une vie, Bernadette, ses enfants et petits enfants. Henri est un homme de passion. Pour lui, le rugby est une seconde famille. Le ballon ovale, l’outil pour son épanouissement permanent. Jouer collectif, il sait ce que cela veut dire. Amoureux du rugby à XIII, il a surtout pratiqué avec l’équipe de sa cité. Son talent rugbystique, plus qu’honorable, avait attiré l’attention des dirigeants de Quillan. Cette équipe évoluait en 1re division à ce moment-là, mais à XV. Vite de retour vers sa destinée de « treiziste », il devait jouer demi-d’ouverture le plus longtemps que devait le lui permettre sa condition physique. Gouailleur dans l’âme, Henri sait écouter, entendre, reconnaît ses erreurs et possède une qualité essentielle pour l’homme qui se respecte : celle d’aimer par-dessus tout, la vérité. Aujourd’hui, son temps libre, il le consacre au perfectionnement de son art. C’est lui l’inventeur de la technique de décoration des bouteilles.

Son art

Henri sait ce qu’il doit à son école d’apprentissage pour devenir peintre en bâtiment à Vernet-les-Bains. C’est en exploitant le savoir acquis à ce moment-là, qu’il a fait naître son art : la décoration de bouteilles en verre. Nous ne dévoilerons pas tous les secrets qu’il a bien voulu nous confier. Sachez qu’il utilise du vernis, qu’il découpe des photos, des titres dans des magazines qui sont ensuite collés. Ses motifs préférés, il les trouve dans les années yé-yé. Ainsi, l’épithète « le rock notre religion, Johnny notre Dieu » trône-t-elle à la première place dans ses réalisations préférées. Elle côtoie des illustrations sur son sport de prédilection, mais aussi d’amis disparus trop tôt ou encore bien vivant et ancrés dans la réalité d’amitiés indestructibles que l’équipe de rugby, le sport, ont soudé pour toute une vie. C’est son pays, le pays catalan, qui est souvent mis en avant dans ses recherches d’harmonie pour le plaisir des yeux, mais aussi du souvenir de moments heureux faisant vibrer, cela se sent, le cœur d’un homme ayant su garder la générosité de sa jeunesse. Générosité inculquée par des parents, par une famille vraiment dignes du plus grand intérêt. N’en doutons pas, avec Pierrot, l’éternel voyageur de par le monde, plus tard, ils sauront, ensemble, faire grandir cet art que nous oserons nommer : « l’art de la fidélité, du souvenir »

Henri et son passé yé-yé
Henri et son passé yé-yé