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lundi 18 août 2025

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Cette récolte de Saint-Jean que 3 femmes du Conflent gardent pour leurs infusions d’été

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Dans les cortals du Conflent, quand les dernières braises de la Saint-Jean rougeoient encore, trois femmes bergers perpétuent un rituel que leurs arrière-grands-mères leur ont transmis. Elles montent vers les estives, guidées par la lune courte du solstice, pour récolter l’achillée millefeuille à son apogée. Cette nuit-là, disent-elles, la plante concentre tous ses bienfaits pour la santé féminine.

Marie-Claire, Dolors et Montse connaissent chaque prairie entre 800 et 1600 mètres d’altitude où prospère cette herbe aux mille vertus. Leurs gestes précis, appris dès l’enfance, révèlent une science ancestrale que seule la transmission orale a préservée. Car l’achillée récoltée cette nuit-là devient le remède d’été le plus précieux des familles du Conflent.

Cette tradition millénaire trouve aujourd’hui un écho particulier chez les femmes qui cherchent à retrouver des solutions naturelles pour leur bien-être quotidien. L’achillée millefeuille, cette « herba de les talls » comme l’appellent encore les anciens, offre des propriétés régulatrices exceptionnelles quand elle est récoltée selon ces techniques ancestrales.

L’origine de cette tradition catalane

La nuit magique du solstice d’été

Au cœur des Pyrénées catalanes, les bergers ont toujours su que le 24 juin marque le moment où l’achillée concentre ses principes actifs au maximum. Les monoterpènes, qui représentent 90% de ses huiles essentielles, atteignent leur pic de concentration durant cette période de floraison optimale. Nos anciens avaient intuitivement découvert ce que la science confirme aujourd’hui.

Des estives du Canigó aux mas du Roussillon

Cette pratique s’enracine dans la culture pastorale du Conflent, où chaque famille de bergers transmettait ses secrets de cueillette de mère en fille. L’achillée des hautes prairies, soumise aux conditions extrêmes d’altitude, développe une richesse en béta-caryophyllène et camphre particulièrement recherchée pour ses vertus antispasmodiques et régulatrices du cycle menstruel.

Le geste précis qui fait la différence

La technique de récolte nocturne

Marie-Claire froisse toujours les feuilles entre ses doigts avant de couper la plante, vérifiant ainsi la concentration des huiles essentielles par leur parfum intense. Cette évaluation olfactive, transmise par sa grand-mère, permet de sélectionner uniquement les plants au pic de leurs propriétés thérapeutiques. La récolte s’effectue en coupant les sommités fleuries à deux tiers de la tige.

« Quand l’achillée embaume fort sous les doigts, c’est qu’elle est prête. Mamie disait toujours : si elle ne sent pas, elle ne soigne pas. » – Conseil de Dolors, bergère à Py

Le séchage selon les règles d’autrefois

De retour au cortal avant l’aube, les femmes suspendent immédiatement les bouquets tête en bas dans le grenier à foin. Cette technique préserve l’intégrité des azulènes, ces composés bleus caractéristiques qui confèrent à l’achillée ses propriétés anti-inflammatoires. Le séchage s’achève en quinze jours, quand les tiges craquent sous la pression des doigts.

Comment nos anciens procédaient

Les infusions régulatrices traditionnelles

Nos arrière-grands-mères préparaient leurs infusions d’été avec une cuillère à café d’achillée séchée pour une tasse d’eau frémissante. L’infusion, toujours couverte pendant dix minutes, préservait les huiles essentielles volatiles. Cette tisane, bue trois fois par jour pendant les chaleurs estivales, accompagnait naturellement les cycles féminins.

L’application directe sur les blessures

Sur les estives, quand les coupures survenaient, les bergers froissaient directement les feuilles fraîches d’achillée et les appliquaient sur la plaie. Les tanins astringents stoppaient immédiatement les saignements, tandis que les flavonoïdes accéléraient la cicatrisation. Cette technique d’urgence a sauvé bien des journées de transhumance.

L’adapter aujourd’hui dans votre quotidien

Cultiver l’achillée près de chez vous

Vous pouvez facilement installer quelques plants d’achillée dans un coin ensoleillé de votre jardin ou sur votre terrasse. Cette vivace rustique supporte parfaitement la sécheresse méditerranéenne et fleurit de juin à septembre. Privilégiez les variétés sauvages aux hybrides horticoles, moins concentrées en principes actifs.

Préparer vos propres infusions d’été

Récoltez vos sommités fleuries par temps sec, en milieu de matinée. Conservez-les dans des bocaux hermétiques après séchage complet. Une infusion quotidienne d’achillée, additionnée de miel de châtaignier de nos montagnes, constitue un excellent tonique estival pour accompagner naturellement votre bien-être féminin.

Ces trois femmes du Conflent perpétuent ainsi un savoir-faire authentique que chacune peut s’approprier. Comme les herbes de la Saint-Jean du Vallespir, l’achillée millefeuille illustre cette richesse ethnobotanique catalane qui mérite d’être transmise. En adaptant ces gestes ancestraux à notre époque, nous redécouvrons des solutions naturelles éprouvées par des siècles de sagesse montagnarde.

Car dans chaque infusion d’achillée se perpétue l’héritage de ces femmes courageuses qui, comme lors des montées estivales du Conflent, continuent d’enrichir notre patrimoine vivant. Cette tradition, simple mais précieuse, nous reconnecte aux cycles naturels et à la sagesse de nos anciens. À nous maintenant de la transmettre aux générations futures, en profitant des heures fraîches de l’été pour perpétuer ces gestes de bien-être authentiquement catalans.