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vendredi 6 juin 2025

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Le prix Goncourt Laurent Gaude au mémorial du camp de Rivesaltes

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Prix Goncourt, Prix Goncourt des lycéens, Prix des libraires, Prix Jean-Giono… En l’espace de quelques romans, Laurent Gaudé était de passage en Roussillon à l’invitation du CML, du Mémorial et de SOS Méditerranée. 300 personnes sont venues à sa rencontre.

Mais Laurent Gaudé est un homme de conviction. Parrain de SOS Méditerranée, une association européenne de sauvetage en mer Méditerranée créée en juin 2015, il œuvre depuis des années aux côtés de structures d’aide aux migrants. 300 personnes sont venues à sa rencontre au Mémorial de Rivesaltes, dont plusieurs classes de lycéens.

Quand il est arrivé jeudi 25 mai à Perpignan par l’avion de midi, il a découvert, en plongeant sur l’aéroport, un curieux paysage dans la plaine. Un mouchetis de traits blancs rassemblés en carrés et, au milieu, un immense rectangle couleur sable, comme une table de géant. A quelques kilomètres des pistes, dans un paysage de vignes et de zones d’activités surplombées d’éoliennes, il est arrivé au mémorial du camp de Rivesaltes, ce point névralgique de la mémoire de l’internement en France. Une multitude de baraquements en ruines, parfaitement alignés. C’est ce que l’on aperçoit depuis le ciel. De ces bâtiments précaires, couverts de tags, sans toit pour la plupart, au bord de l’effondrement, suintent tristesse et mélancolie. On dirait une œuvre d’Anselm Kiefer, l’artiste allemand dont les sculptures, travaillées par le temps, s’effondrent dans un fracas de verre brisé.

Il n’est pas ici par hasard. On connait tous son engagement. Il écrit sur le monde qui saigne. Il plaide pour une Europe ouverte aux réfugiés.

Partir, c’est mourir un peu. Pour beaucoup de migrants, partir, c’est mourir complètement. On estime à plusieurs dizaines de milliers le nombre de réfugiés qui ont péri en Méditerranée depuis quinze ans. A ces exilés en péril, mais aussi aux victimes de l’ouragan Katrina, aux rescapés du tremblement de terre en Haïti qu’il évoque dans un roman de vie et de mort, Danser les ombres, il a donné un visage et une âme dans ses romans. Mais il serait injuste de réduire Danser les ombres à un roman sur la catastrophe. Il dresse avant tout le portrait d’une ville incroyable et de ses habitants qui, toujours, se relèvent.

Plus que ça, il apporte à ces sujets sa lumière particulière. Il insuffle de la douceur dans l’horreur, de l’épique dans le dramatique.

Eldorado témoigne aussi de cette qualité de métissage. Il y raconte une double migration. Celle de Soleiman et Boubakar, du Soudan à Ceuta, et celle, moins classique, du commandant Piracci, garde-côte sicilien qui laisse le confort de l’Europe pour errer comme une ombre sur les routes d’Algérie.

« Eldorado » provoque des sueurs froides, car, dans ce magnifique roman, le commandant Piracci constate un tel appétit dans le regard des réfugiés qu’il décide de prendre la route lui aussi. Comme si l’exil était un choix et non une fatalité…