L’horloge de la porte Beffroi vient de sonner midi quand j’arrive à Salers ce matin de juillet. Les pierres volcaniques du village brillent sous le soleil cantalien, et déjà, l’odeur du fromage qui affine dans les caves me rappelle pourquoi ce petit bourg de 500 habitants à 900 mètres d’altitude figure parmi mes coups de cœur secrets d’Auvergne. Entre ses murailles du XVe siècle et ses vaches rousses qui paissent sur les volcans, Salers cache bien plus d’histoires que ne le laissent supposer ses ruelles pavées.
Quand les habitants défièrent leur baron pour construire leurs murailles
En 1424, les Sagraniers – c’est ainsi qu’on appelait les habitants de Salers – ont commis un acte de rébellion qui résonne encore aujourd’hui dans les pierres du village. Ils ont décidé de fortifier leur bourg malgré l’opposition farouche de leur baron local. « Chacun a payé selon la taille de son terrain », me confie Jeanne, guide locale depuis trente ans, en caressant les pierres de la muraille. Le duc de Bourbon leur donnera finalement raison en 1438, autorisant officiellement « une ville et forteresse garnie de portes, murailles fortes, pont-levis, tours, créneaux ».
Cette détermination collective a créé un village unique : jamais pris lors des guerres de religion, Salers a traversé les siècles avec ses trois portes d’origine intactes. Un exploit architectural que peu de villages de cette taille peuvent revendiquer, à l’image de ce village de 200 habitants à 532 mètres cache une église romane du XIe siècle, autre perle du patrimoine français préservé.
Entre traditions vivantes et modernité assumée : l’âme Salers dévoilée
La vraie magie de Salers réside dans son authenticité vivante. Le fromage AOC Salers n’est produit qu’entre avril et octobre, uniquement au lait cru des vaches qui paissent sur les hauts plateaux volcaniques. Cette tradition millénaire fait de Salers l’un des rares villages à posséder à la fois une AOC fromagère et une race bovine propres.
Sur la place Tyssandier d’Escous, Pierre, fromager de troisième génération, me raconte la légende locale : « Nos vaches Salers auraient autrefois protégé le village en courant sur les remparts la nuit pour effrayer les ennemis. » Un sourire malicieux éclaire son visage buriné. Cette histoire, vraie ou fausse, illustre parfaitement l’attachement viscéral des Salésiens à leurs traditions.
Les marchés du vendredi et samedi matin transforment le village en théâtre vivant où se mélangent touristes curieux et habitants fidèles. C’est ici que j’ai découvert la truffade authentique, préparée selon la recette que se transmettent les familles depuis des générations.
Carnet d’adresses de l’explorateur : mes coups de cœur secrets
Au-delà des sentiers battus, Salers révèle ses trésors aux voyageurs patients. La balade fresque des paysages organisée par le Parc des Volcans propose une randonnée de 4 kilomètres sur les traces de l’architecture vernaculaire. Gratuite mais sur inscription, elle dévoile des panoramas que même les cartes postales oublient.
Mon spot photo secret ? Les hauteurs du village au coucher de soleil, quand la lumière dorée caresse les toits de lauze et que la vallée de la Maronne s’étend à perte de vue. Un cadre digne des plus beaux châteaux de France, mais en pleine nature volcanique.
À dix kilomètres, Tournemire et son château d’Anjony méritent le détour. Ce village méconnu offre une alternative plus paisible aux foules estivales de Salers, tout en conservant le label « Plus Beaux Villages de France ».
Guide du voyageur malin : budgets, transports et bonnes adresses testées
Pour un séjour réussi, comptez 60 à 90€ par jour en solo, incluant repas traditionnel et visites. Les chambres d’hôtes locales oscillent entre 70 et 150€ la nuit selon la saison. Réservez absolument à l’avance en été !
Côté transport, la voiture reste indispensable. Les parkings gratuits à l’entrée du village facilitent l’exploration du centre piétonnier. La gare d’Aurillac, à 24 kilomètres, dessert la région par train depuis les grandes villes.
Ma table coup de cœur ? L’auberge familiale sur la place centrale, où le patron propose une truffade maison à 18€ et des fromages Salers affinés dans ses propres caves. Un festin qui justifie à lui seul le voyage, comparable aux spécialités que l’on trouve dans cette ville de 4 000 habitants cache les secrets de George Sand et des artisans oubliés.
Ce que les guides ne vous disent jamais
Le secret que m’a confié Marie, la libraire du village
Les meilleures photos se prennent tôt le matin vers 7h30, quand la brume matinale enveloppe encore les volcans et que les touristes dorment encore.
L’erreur de débutant que j’ai faite (pour que vous l’évitiez)
Ne visitez pas Salers uniquement en juillet-août ! Juin et septembre offrent un climat idéal, des tarifs plus doux et une authenticité préservée.
Le détail qui change tout selon les locaux
Demandez toujours si le fromage Salers est « de montagne » : seul celui produit sur les hauts pâturages pendant l’estive mérite vraiment l’appellation.
Ma découverte totalement inattendue
Les anciennes fermes isolées autour du village proposent parfois des visites privées sur rendez-vous, révélant des techniques d’élevage ancestrales encore pratiquées.
Le conseil que je donne à mes proches
Prévoyez une journée complète minimum : Salers se savoure lentement, comme un bon fromage qui révèle ses arômes avec le temps. « Poc a poc », diraient mes amis catalans – petit à petit, tout vient à point.