Le Centre National de la Recherche Scientifique (Cnrs) et le Groupe Associatif Estuaire déploient depuis l’année 2015 une expérience de science participative mobilisant chaque année 15 000 bénévoles pour le suivi des vers luisants et lucioles en France. Ils ont participé à la découverte et à la cartographie d’une espèce sud-américaine dans les Pyrénées-Orientales. Cette espèce, se nourrissant de vers de terre, semble disposer d’une haute capacité à s’adapter au territoire européen et pourrait étendre rapidement sa distribution en impactant négativement le fonctionnement des écosystèmes.
Nom latin : Photinus signaticollis.
Appartenant au genre américain Photinus, cette espèce de luciole est apparue soudainement en 2016 dans la province de Girone (Catalogne, Espagne). Elle s’y disperse très rapidement. En seulement trois ans elle a franchi les 28 km qui la séparaient de la frontière française en passant probablement par le couloir de La Jonguera et le Col de Perthus. En 2020, grâce aux observateurs du programme de sciences participatives L’Observatoire des Vers Luisants et des Lucioles (Ovl), et dans le cadre d’une collaboration internationale de sciences participatives, une population déjà bien installée a été repérée dans le village de Maureillas-las-Illas dans les Pyrénées-Orientales.
En 2018, cette luciole avait été décrite comme nouvelle, sous le nom de Photinus immigrans. Néanmoins, une analyse plus poussée nous a permis de conclure qu’il s’agit finalement d’une espèce d’origine sud-américaine (Argentine et Uruguay), portant déjà le nom scientifique de Photinus signaticollis (Lampyre à corselet marqué), décrite en 1846 par le scientifique français Charles Émile Blanchard.

Sa dynamique de population laisse à penser que ce Photinus pourrait devenir une nouvelle espèce invasive. Elle colonise les prairies de fauche, les gazons de jardin et même les champs de maïs ou d’autres cultures intensives, avec a priori une préférence pour les zones les plus humides. Consommant des vers de terre, son impact sur l’écosystème pourrait être significatif.
L’insecte se différencie des vers luisants et lucioles français par le fait que les mâles comme les femelles sont capables de voler. L’animal se distingue également par une lumière clignotante jaune-orangé émise en vol par les deux sexes. Ces lumières sont produites par le phénomène biologique appelé bioluminescence : il s’agit d’une réaction biochimique durant laquelle une enzyme (appelée luciférase) oxyde une petite molécule (appelée luciférine) produisant ainsi de la lumière.

Une équipe de spécialistes français, belges et espagnoles organise un suivi permanent de cette espèce sur le territoire français et européen. Pour la France, c’est l’Ovl qui est le relais de cette étude, portée conjointement par le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et le Groupe Associatif Estuaire (Gae). Ce réseau compte plus de 15 000 bénévoles actifs.
Publication scientifique : Koken et al. (2022) Quick Spreading of Populations of an Exotic Firefly throughout Spain and Their Recent Arrival in the French Pyrenees. MDPI-Insects 2022, 13(2), 148.
https://www.mdpi.com/2075-4450/13/2/148
Étude dirigée par Dr. Fabien Verfaillie et Dr. Marcel Koken (France), Dr. José Ramon Guzmán-Álvarez (Espagne), Dr. Raphaël De Cock (Belgique). Premières observations en France par les bénévoles de l’OVL : Geneviève Laurent et la famille Stepien.
Avec la collaboration de Nicole Wolffler, Lucas Ezequiel Rubio, Miguel Angel Romo Bedate, Diego Gil-Tapetado et Segimon Rovira Comas.
